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Faustus et moi : l’inauthenticité de la pop
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La théorie sociologique et les cultural studies ont facilement évincé, sous prétexte d’élitisme et d’archaïsme, les positions de Theodor W. Adorno, philosophe majeur de l’Ecole de Francfort et pourfendeur du formatage, de la musique légère et de la Kulturindustrie. Malheureusement, les conséquences de ces attaques en partie justifiées sont celles d’un certain relativisme, selon lequel la musique pop ne serait qu’un objet de consommation comme les autres. Elle continue donc d’être déconsidérée par ceux qui se préoccupent de formes artistiques apparemment moins dépendantes des circuits médiatiques. Pour Agnès Gayraud, chanteuse du groupe La Féline et auteur d’un livre sur Adorno et la pop music à paraître chez François Bourin, il faut accepter le reproche d’inauthenticité qu’adresse Adorno à la pop, pour y voir une chance du point de vue esthétique, et même ébaucher l’hypothèse d’une critique de l’inauthenticité opérée par la musique elle-même. « Une sociologie critique de la musique devra rechercher dans le détail pourquoi, aujourd’hui, autrement qu’il y a encore cent ans, la musique légère est mauvaise, doit être mauvaise sans exception. » T. W. Adorno, Introduction à la sociologie de la musique « Dans certaines parties de ce manuel […] nous allons t’induire en erreur. Nous allons te mentir mais nous allons tout autant nous mentir à nous-mêmes. » KLF, The Manual (How to have a number one the easy way), The justified ancients of Mu Mu reveal their zenarchist method used in making the unthinkable happen , 1988 Il est toujours difficile, parfois même décourageant, de parler pop avec un amateur exclusif de « grande musique ». Face au mélomane savant, appelons-le Faustus, à qui je voudrais vanter les mérites de la pop en général ou de telle œuvre pop en particulier, toute tentative de légitimation semble vouée à l’échec. Je peux décrire à Faustus l’admiration de McCartney pour Stockhausen, le rapport de Reed et Cale au minimalisme américain, lui raconter que c’est un musicien classique qui enseigna l’usage du Moog à Giorgio Moroder ou lui parler de l’impact de la musique concrète sur une certaine avant-garde pop : je sais que je fais fausse route. À l’aune de critères musicologiques savants, élaborés sur mille ans de musique écrite, la pop a à peu près tout à perdre : au pire, elle apparaît comme une musique indigente, répétitive et standardisée ; au mieux, elle est ce que la relecture au synthé des Tableaux d’une exposition par Emerson, Lake & Palmer sont à l’œuvre originale composée par Moussorgski : une voie de passage pour illettrés vers la véritable musique. Tenter de l’élever dans une supposée échelle musicale en fonction de ces critères ne fait qu’entériner son infériorité, sans aider à penser sa différence. Pour être fidèle à la pop, je ne gagne donc rien à employer avec Faustus le langage de la légitimation. Mieux vaut partir du pire, de ce qu’elle est au grand jour, avec son musée des horreurs et sa légende non pas accidentellement liée à mais indissociable de faux groupes, de chanteurs sans talents et de mascarades télévisuelles.
Title: Faustus et moi : l’inauthenticité de la pop
Description:
La théorie sociologique et les cultural studies ont facilement évincé, sous prétexte d’élitisme et d’archaïsme, les positions de Theodor W.
Adorno, philosophe majeur de l’Ecole de Francfort et pourfendeur du formatage, de la musique légère et de la Kulturindustrie.
Malheureusement, les conséquences de ces attaques en partie justifiées sont celles d’un certain relativisme, selon lequel la musique pop ne serait qu’un objet de consommation comme les autres.
Elle continue donc d’être déconsidérée par ceux qui se préoccupent de formes artistiques apparemment moins dépendantes des circuits médiatiques.
Pour Agnès Gayraud, chanteuse du groupe La Féline et auteur d’un livre sur Adorno et la pop music à paraître chez François Bourin, il faut accepter le reproche d’inauthenticité qu’adresse Adorno à la pop, pour y voir une chance du point de vue esthétique, et même ébaucher l’hypothèse d’une critique de l’inauthenticité opérée par la musique elle-même.
« Une sociologie critique de la musique devra rechercher dans le détail pourquoi, aujourd’hui, autrement qu’il y a encore cent ans, la musique légère est mauvaise, doit être mauvaise sans exception.
» T.
W.
Adorno, Introduction à la sociologie de la musique « Dans certaines parties de ce manuel […] nous allons t’induire en erreur.
Nous allons te mentir mais nous allons tout autant nous mentir à nous-mêmes.
» KLF, The Manual (How to have a number one the easy way), The justified ancients of Mu Mu reveal their zenarchist method used in making the unthinkable happen , 1988 Il est toujours difficile, parfois même décourageant, de parler pop avec un amateur exclusif de « grande musique ».
Face au mélomane savant, appelons-le Faustus, à qui je voudrais vanter les mérites de la pop en général ou de telle œuvre pop en particulier, toute tentative de légitimation semble vouée à l’échec.
Je peux décrire à Faustus l’admiration de McCartney pour Stockhausen, le rapport de Reed et Cale au minimalisme américain, lui raconter que c’est un musicien classique qui enseigna l’usage du Moog à Giorgio Moroder ou lui parler de l’impact de la musique concrète sur une certaine avant-garde pop : je sais que je fais fausse route.
À l’aune de critères musicologiques savants, élaborés sur mille ans de musique écrite, la pop a à peu près tout à perdre : au pire, elle apparaît comme une musique indigente, répétitive et standardisée ; au mieux, elle est ce que la relecture au synthé des Tableaux d’une exposition par Emerson, Lake & Palmer sont à l’œuvre originale composée par Moussorgski : une voie de passage pour illettrés vers la véritable musique.
Tenter de l’élever dans une supposée échelle musicale en fonction de ces critères ne fait qu’entériner son infériorité, sans aider à penser sa différence.
Pour être fidèle à la pop, je ne gagne donc rien à employer avec Faustus le langage de la légitimation.
Mieux vaut partir du pire, de ce qu’elle est au grand jour, avec son musée des horreurs et sa légende non pas accidentellement liée à mais indissociable de faux groupes, de chanteurs sans talents et de mascarades télévisuelles.
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