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Gayatri Chakravorty Spivak

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Le concept de « worlding » chez Spivak. Dé-crire, Ré-inscrire, Re-monder Cet essai propose une exégèse du concept de worlding tel qu’emprunté à Martin Heidegger et transformé par Gayatri Spivak dans le milieu des années 1980, et donne un aperçu de la manière dont il a été ensuite de nouveau approprié par d’autres critiques. L’analyse de cette démarche constitue ainsi un éclairage sur « la méthode Spivak », laquelle consiste à s’emparer de mots et de concepts pour en faire des outils de production d’une théorie critique qui refuse la clôture, prend à bras-le-corps les discontinuités, et continue de proposer de nouvelles directions de pensée, constituant en cela par elle-même une forme de worlding , c’est-à-dire la composition située et propre d’un ordre du monde. Dans deux essais publiés en 1985 (« Three Women’s Texts and a Critique of Imperialism » et « The Rani of Sirmur: An Essay on Reading the Archives »), Spivak reprend le concept de composition du monde exploré dans l’essai de Martin Heidegger, De l’origine de l’œuvre d’art (1935), pour le transférer du monde artistique au monde colonial, l’investissant ainsi d’un caractère fortement politique. Elle opère simultanément une deuxième substitution, en appliquant les principes de la déconstruction au contexte colonial, se donnant ainsi les moyens d’une critique radicale de l’Occident et du colonialisme ; là où Derrida parle d’écriture, Spivak parle de « discours colonial ». Sur la force de ce concept théorique, la traduction est éclairante. Le texte de Heidegger fut d’abord donné comme conférence et existe en plusieurs versions au début et milieu des années 1930. Là où Heidegger s’efforce de décrire ce qu’est un monde créé par une œuvre d’art, il constate qu’il n’est pas une somme d’éléments, mais un agent à part entière : « Welt weltet » (Heidegger, 1985, p. 22), traduit en anglais par : « The world worlds » (Heidegger, 1935, p. 44 ; italiques dans le texte). La traduction française (de Nicolas Rialland, 2002), évitant de recourir au néologisme verbal par lequel le monde devient agent, opte pour la prudence et passe par une périphrase, tout en ne perdant pas de vue le texte original : « Le monde rassemble et ordonne en monde ( Welt Weltet ) » (Heidegger, 2002, p. 23). En comparaison, la formulation en anglais, fondée sur la verbalisation du nom « monde » et sa répétition, le redoublant comme sujet et verbe d’action, bénéficie d’une véritable force d’énergie critique. Ce texte, en quatre parties, examine tour à tour l’emprunt du concept de worlding de Spivak à Heidegger et l’adaptation qu’elle en a faite au contexte (post)colonial ; la place de la pensée de la déconstruction dans ce geste critique et la réaction des critiques postcoloniaux dans leur ensemble ; plus spécifiquement, la réponse des critiques postcoloniaux n’habitant ni le tiers-monde ( Third World ), ni l’Occident ( First World ), mais la zone ambivalente des anciennes colonies de peuplement ( settler colonies ), à la fois colonisées et colonisatrices ; et plus récemment, la reconfiguration des questionnements liés au worlding dans le cadre d’une mondialisation que Spivak requalifie de « planétarité » ( planetarity ), en réponse aux limites du cadre de l’État-nation, et toujours dans une dynamique de critique évolutive. On peut conclure en constatant que dans la vision de Spivak, la critique est toujours provisoire, réactive, en réponse à des évolutions contemporaines rapides.
Title: Gayatri Chakravorty Spivak
Description:
Le concept de « worlding » chez Spivak.
Dé-crire, Ré-inscrire, Re-monder Cet essai propose une exégèse du concept de worlding tel qu’emprunté à Martin Heidegger et transformé par Gayatri Spivak dans le milieu des années 1980, et donne un aperçu de la manière dont il a été ensuite de nouveau approprié par d’autres critiques.
L’analyse de cette démarche constitue ainsi un éclairage sur « la méthode Spivak », laquelle consiste à s’emparer de mots et de concepts pour en faire des outils de production d’une théorie critique qui refuse la clôture, prend à bras-le-corps les discontinuités, et continue de proposer de nouvelles directions de pensée, constituant en cela par elle-même une forme de worlding , c’est-à-dire la composition située et propre d’un ordre du monde.
Dans deux essais publiés en 1985 (« Three Women’s Texts and a Critique of Imperialism » et « The Rani of Sirmur: An Essay on Reading the Archives »), Spivak reprend le concept de composition du monde exploré dans l’essai de Martin Heidegger, De l’origine de l’œuvre d’art (1935), pour le transférer du monde artistique au monde colonial, l’investissant ainsi d’un caractère fortement politique.
Elle opère simultanément une deuxième substitution, en appliquant les principes de la déconstruction au contexte colonial, se donnant ainsi les moyens d’une critique radicale de l’Occident et du colonialisme ; là où Derrida parle d’écriture, Spivak parle de « discours colonial ».
Sur la force de ce concept théorique, la traduction est éclairante.
Le texte de Heidegger fut d’abord donné comme conférence et existe en plusieurs versions au début et milieu des années 1930.
Là où Heidegger s’efforce de décrire ce qu’est un monde créé par une œuvre d’art, il constate qu’il n’est pas une somme d’éléments, mais un agent à part entière : « Welt weltet » (Heidegger, 1985, p.
22), traduit en anglais par : « The world worlds » (Heidegger, 1935, p.
44 ; italiques dans le texte).
La traduction française (de Nicolas Rialland, 2002), évitant de recourir au néologisme verbal par lequel le monde devient agent, opte pour la prudence et passe par une périphrase, tout en ne perdant pas de vue le texte original : « Le monde rassemble et ordonne en monde ( Welt Weltet ) » (Heidegger, 2002, p.
23).
En comparaison, la formulation en anglais, fondée sur la verbalisation du nom « monde » et sa répétition, le redoublant comme sujet et verbe d’action, bénéficie d’une véritable force d’énergie critique.
Ce texte, en quatre parties, examine tour à tour l’emprunt du concept de worlding de Spivak à Heidegger et l’adaptation qu’elle en a faite au contexte (post)colonial ; la place de la pensée de la déconstruction dans ce geste critique et la réaction des critiques postcoloniaux dans leur ensemble ; plus spécifiquement, la réponse des critiques postcoloniaux n’habitant ni le tiers-monde ( Third World ), ni l’Occident ( First World ), mais la zone ambivalente des anciennes colonies de peuplement ( settler colonies ), à la fois colonisées et colonisatrices ; et plus récemment, la reconfiguration des questionnements liés au worlding dans le cadre d’une mondialisation que Spivak requalifie de « planétarité » ( planetarity ), en réponse aux limites du cadre de l’État-nation, et toujours dans une dynamique de critique évolutive.
On peut conclure en constatant que dans la vision de Spivak, la critique est toujours provisoire, réactive, en réponse à des évolutions contemporaines rapides.

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